Splendeurs et misères

Publié le par kate.rene

Dans un dédale de pièces assombries aux murs tapissés de velours rouge ou noir et dans une atmosphère confinée et licencieuse rappelant une maison de passe ou plus vulgairement un bordel, l'on découvre les splendeurs et les misères de la prostitution et des maisons closes au travers d'œuvres artistiques de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. La reconstitution scénographique est magistrale. La qualité et la quantité d'œuvres présentées en font une exposition fascinante. Si le sujet est osé, sinon audacieux, son traitement artistique "sublime" la réalité de ce "mal" social que représente la prostitution où l'avilissement de la femme-objet n'a d'égale que l'hypocrisie du mâle qui veut la contrôler pour mieux en abuser à sa guise. Œuvres essentiellement françaises et parisiennes. En effet Paris était considérée comme la nouvelle Babylone au tournant du XXe siècle où la luxure côtoyait la misère des faubourgs responsable social de la prostitution comme le décrit A. Dumas dans son livre Filles, lorettes et courtisanes (Les Éditions de Paris Max Chaleil, ISBN 978-2-84621-121-5). Puis au détour des salles du magnifique musée d'Orsay qui propose cette exposition temporaire, le visiteur (fatigué) peut se reposer sur de magnifiques divans recouverts de velours grenat disposés en rond au centre des salles, image classique des lupanars. Et là, nous avons découvert la représentation de celle issue des Écritures, la repentante, l'ancienne prostituée, la "femme" de Jésus : Marie-Madeleine. Celle que nous affectionnons tellement et dont le traitement et la représentation picturale sont tout à la fois iconoclastes, blasphématoires, impudiques et fascinants...

Marie-Madeleine pénitente, Paul Baudry, 1858

Marie-Madeleine pénitente, Paul Baudry, 1858

1 - La beauté voluptueuse d'une Madeleine pénitente de Paul Baudry, (1858, cat. 184) dans une position lascive à demi-nue, nous laissant admirer ses seins et dont le reste du corps est drapé d'un châle bleu. Son regard implore le pardon. Une croix est posée devant elle, objet d'expiation et d'adoration, une cruche d'eau et du pain en guise de punition et un crâne, image allégorique de la réflexion, lui tiennent compagnie dans ce lieu isolé, rocailleux et hostile.

La Madeleine chez le pharisien, Jean Béraud, 1891

La Madeleine chez le pharisien, Jean Béraud, 1891

2 - La madeleine chez Le Pharisien de Jean Beraud, (1891, cat. 195) immense toile provocante. Le sujet est emprunté à l'Evangile de Luc, transposé à l'époque moderne, thème à la mode du jour. Si le Christ auréolé a une représentation canoniquement conforme (même si elle emprunte les traits d'un certain Albert Duc-Quercy), la Madeleine est une courtisane aux pieds de son Dieu. La scène se passe devant des hommes au regard lubrique en habit de soirée qui se lèvent de la table du repas pour venir regarder, épier ce qui se passe. La Madeleine emprunterait pour certains commentateurs de l'époque les traits d'une courtisane célèbre de la fin du XXe siècle.

Mary de Magdala, Gustav Adolf Mossa, 1907

Mary de Magdala, Gustav Adolf Mossa, 1907

3 - La plus osée et la plus blasphématoire : Mary de Magdala de Gustav Adolf Mossa (1907, cat. 209). La scène est centrée sur un crucifix de style trecento italien, la figure et le corps du Christ sont cachés par une femme vue de dos en tenue moderne, de laquelle on voit clairement les fesses nues au travers du tissu transparent de la robe et qui paraît embrasser le supplicié divin. Leurs pieds unis reposent sur une effigie grimaçante de Satan, le tout dans un décor citadin de la Jérusalem Céleste et Éternelle.

Splendeurs et Misères, Musée d'Orsay, c'est jusqu'au 17 janvier, ne tardez pas !!!

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