Un viaggio in maschera
J3, 9 mars.
René est sorti pour son tour du matin et pour quelques achats.
Le soleil est insolent ! Mais c’est que d’la gueule, y chauffe pas.
La ballade de l’après-midi commence par une séance dessin sur un banc de la Bragora. Un vieux monsieur fait un pisolino sous un arbre, un malotru crie dans son téléphone un. peu plus loin. Même les pigeons se font rares.
Puis LA piazza, profitons-en tant qu’elle est vide. Les mosaïques extérieures de la Basilique sont pour nous seuls. Nous admirons la translation des reliques de San Marco depuis Alexandrie dans une peau de cochon. Nous avons déjà consacré un article à cette histoire.
Pour une fois, nous aurions volontiers tâté du Florian mais il est désespérément chiuso. Nous nous offrons une petite virée sur le Canal Grande. Pas de vagues, pas de trafic. Nous descendons à Rialto. Le grand déballage du luxe au fondaco dei Tedeschi est en revanche ouvert, comme tous les Chanel, Gucci, etc des rues alentour. Commerces de première nécessité ?? Un préposé à la température nous teste. Nous passons l’épreuve avec succès. Sans sa clientèle asiatique, l’endroit est inanimé et sinistre. Nous faisons demi-tour immédiatement et rentrons tranquillement. Sur quelques étals de légumes, il y a des tardivi, ces salades violettes qu’on ne trouve qu’ici, des traure, petits artichauts tout tendres, des asperges vertes ou blanches et même des fraises.
Notre nid douillet est de plus en plus haut…
E adesso il punto di vista di Renato :
Première sortie. matinale. : je m’arrête en premier lieu à la Bragora qui est tout près de « chez nous » L’église (dite de Vivaldi). est ouverte ! Je rentre, je suis seul, hormis le bedeau, debout au fond dans l’attente de… Je m’engage dans l’allée centrale jusqu’au maître-autel au-dessus duquel se dresse en majesté un Cima da Conegliano, le Baptême du Christ, qui n’est pas éclairé. Je le laisse plongé dans sa pénombre silencieuse et je sors par la porte latérale sur le campo dei Piovan où, comme à la Bragora, il y a des bancs… tellement rare dans la città. Et je m’engage dans les calle, passant par le campo de le Gate, pour rejoindre « mes » petits commerçants habituels de la salizzada San. Francesco et de la calle Sacca (boulangerie, marchand de peinture et matériel de dessin, boucherie…). « Mon vendeur de vin au détail (Al Canton Del Vin) est fermé ; en fait, je le découvre un peu plus loin, dans un autre local, installé maintenant en face de la « célèbre » épicerie des frères Ortis dal 1914. Mon impression d’étrangeté presque. angoissante d’hier disparaît ; je retrouve « ma Venise » du quotidien quand. je fais les courses…
Dans les pas du Piéton de Venise de Dominique Fernandez que nous venons de commencer sur un banc de la Bragora, nous décidons de nous laisser entraîner par ses deux premiers chapitres à San Marco et sur le Grand Canal. La surprise et l’émerveillement sont au rendez-vous. Si, naturellement TOUT est fermé, en revanche l’on peut admirer pour la première fois les bâtiments et édifices de la piazza et de la piazzetta sans ces hordes de touristes agglutinés qui nous font généralement éviter ces lieux… en temps ordinaires. Détail : l’illustration en mosaïque de la « légende » de la relique de Saint-Marc sur le. tympan de la. troisième arcade. de la façade de la Basilique San. Marco : « elle se lit de gauche à droite…, le corps préalablement emballé dans une carcasse de cochon, …., les douaniers mahométans … ils s’écartent avec dégoût,… l’un se bouche le nez…. » (p. 26) et de citer à plusieurs reprises Théophile Gautier (Italia 1855) : il faut lire absolument la partie consacrée à Venise, publiée en 2014 à Nous Eds.
Nous sommes une vingtaine sur la piazza. UNE gondole accepte des passagers… Les autres se balancent mélancoliquement au gré de l’onde du bacino San Marco, paresseuses et délaissées, comme abandonnées… Devant le Harrry’s Bar, fermé, nous prenons le vaporetto 1. Il est presque vide. nous nous asseyons à l’avant, place généralement prise d’assaut pour contempler les façades des palais « dont les sinuosités de cette avenue aquatique qui sont déjà un défi au principe de la rue rectiligne, la même débauche composite qu’à San Marco, la même marquetterie de styles divers. » p. 27. Pas de circulation sur le Canal Grande. Le pont du Rialto vide. La Città est dans un état de somnolence avancée, voire de paralysie généralisée.