L'hospice de la Pietà
Séduits par la quatrième de couverture,
"Cecilia vit dans l'orphelinat abrité par l'hospice de la Pietà, à Venise, où elle a été recueillie à sa naissance, quand sa mère l'a abandonnée. Elle y mène une vie rangée, partagée entre la routine rigoureuse du pensionnat et le violon qu'elle joue chaque jour à l'église. Dans cet univers confiné et recllus où cecilia évolue, la musique est sa seule source de joie et de réconfort, tandis que chaque nuit l'absence de sa mère la fait cruellement souffrir. Mais tout change l'année de ses seize ans, lorsqu'un nouveau professeur de musique vient remplcer le vieil abbé besoogneux qui officiait auparavant : un jeune prêtre aux cheveux roux qui n'est autre qu'Antonio Vivaldi. Pendant compte du destin de nombreuses jeunes filles ayant appartenu à la maîtrise instrumentale de la Pietà, renommée à travers toutes l'Europe, Tiziano Scarpa bâtit une fiction poignante qui est tout autant une enquête qu'un ommage au compositeur de génie qu'il admire depuis son enfance, ainsi qu'à ses brillantes interprètes." et l'illustration de couverture : Canaletto (Giovanni Antonio Canal 1697-1768), La riva degli Schiavoni,
nous avons acheté le livre de Tiziano Scarpa, Stabat Mater chez Christian Bourgeois Éditeur.
Nous connaissons bien la Riva degli Schiavoni et la Pietà : c'est "notre" quartier. À deux pas de là, vous empruntez la Calle de la Pietà, puis le Ramo Querini. Au bout se trouve la Corte Querini et au-dessus d'un des immeubles se trouve notre nid. Nous fréquentons les petits commerces de la Salizzada dei Greci, visitons souvent la Scuola degli Schiavoni où se trouvent les Carpaccio, allons lire sur les bancs du Campo Bandiera e Moro en face de San Giovanni en Bragora, l'église où a été baptisé Vivaldi, et profitons du soleil couchant pour lire aussi dans les deux niches disposées de chaque côté du portail de la Pietà, en regardant rosir San Giorgio Maggiore. Maintenant, la vue est un peu perturbée par la nouvelle station de Vaporetto qui mène au Lido. Notre cuisine et le campanile de San Giorgio dei Greci sont mitoyens...
Un jour comme tant d'autres nous passions Calle de la Pietà à côté du Piccolo Museo de Vivaldi. Nous n'avions pas tout à fait les pieds en miettes et il était encore tôt pour le premier verre de Prosecco. Nous sommes entrés. Le musée porte bien son qualificatif de "piccolo". L'accueil du monsieur de l'entrée est chaleureux et les trésors sur lesquels il veille ne lui font pas craindre les voleurs. Quelques partitions, des instruments de musique de l'époque glorieuse de la Pietà, quelques images et des registres... Je ne sais pas pourquoi ces vieux papiers m'ont tant émue. Là sont consignés les noms des orphelines recueillies à l'Ospedale. Ce sont ceux des bébés confiés à la "roue d'abandon" ou tour d'abandon dont j'ai parlé dans un précédent article. Ces jeunes filles dont quelques-unes devenaient virtuoses, chanteuses ou instrumentistes, et qui ont fait la gloire de ces "coro" des orphelinats de Venise ne bénéficient souvent que d'une ligne dans le registre. Date d'arrivée, prénom, emploi, date de mort. Pas de nom de famille puisque celui-ci était la plupart du temps inconnu. Une des plus célèbres, pour qui Vivaldi a composé de nombreuses pièces est Anna Maria dal Violin.
Les bébés étaient parfois déposés avec un signe de reconnaissance qui, plus tard, peut-être, permettrait à la mère de retrouver son enfant : une médaille coupée en deux, un dessin déchiré, dont l'autre partie était conservée par la mère (voir à droite).
Antonio Vivaldi (1678-1741) maestro de concerti de 1703 à 1740 à la Pietà.
Je ne vais pas raconter sa vie ici puisque n'importe quelle recherche sur Google vous en dira plus. J'aimerais simplement dire à ceux qui ne connaissent de lui que les Quatre Saisons et ne l'apprécient pas sont comme des hommes n'ayant goûté qu'un pichet de "vin du patron" et diraient ne pas aimer le vin. Les concertos pour violoncelle, le Stabat Mater, le Nisi Dominus, les opéras (notre première découverte et qui reste dans notre top ten : la verità in cimento), etc.
Pour en revenir à notre roman, après avoir eu quelques difficultés avec le début, je me suis laissée envoûter par le rythme du livre, par l'ambiance et je l'ai terminé sans m'arrêter. Et suis
retournée en pensée au piccolo museo, à la calle de la Pietà, à l'hôtel Metropole où se trouvait initialement l'Ospedale (il y reste deux vestiges : des colonnes), au petit concert entendu le
soir du 2 avril à l'église de la Pietà
... à Venise.