Trinacria, du côté des Grecs
Pour poser nos valises, nous avons choisi un agriturismo proposé par le Routard : Tenute Margana. Nous avons suivi sur quelques kilomètres un chemin de terre au milieu des vignes et… des moutons. Valerio s'occupe de nous, seuls résidents du moment. Quant au repas du soir qu'il nous a préparé, rien que les antipasti valent le détour. Paysage de collines douces aux formes harmonieusement arrondies comme des mamelons successifs, tout en dégradés de vert tendre que ponctue le vert sombre des pins et des cyprés. Le bêlement des moutons dont certains portent des clochettes vient troubler le chant des oiseaux.
Les Élymes, les Grecs, les Carthaginois, les Étrusques, les Romains, les Vandales, les Normands, les Musulmans… ils ont tous laissé une trace de leur passage sur ce site étonnant que l'on visite à pied ou en bus. Le temple dorique est le clou du spectacle. Il a résisté au temps, aux invasions et aux tremblements de terre. Inachevé (les colonnes n'ont jamais été cannelées) et pourtant résolument debout sur ses 36 colonnes, il est posé là, depuis vingt-quatre siècles, au milieu des collines. Un peu plus haut, l'amphithéâtre, beaucoup plus jeune (il date seulement du IIIe siècle avant J.C.) s'ouvre sur la vallée et la montagne. Quel fond de scène ! On aimerait y voir jouer Phèdre avec Dominique Blanc, mais il ne faut pas rêver. Au mois de juillet, on peut y assister à des représentations des classiques grecs.
Après les grecs, nous faisons une incursion dans ce qui s'appelle la Sicile africaine. Sur la petite péninsule de Trapani où règne le baroque, églises et palais s'articulent autour du Corso Vittorio Emanuele et de la via Garibaldi. La cathédrale des Gesuiti, dédiée à l'immaculée conception n'échappe pas à la crème fouettée et aux dorures, exubérance du baroque.
Puis c'est Erice, construite sur une colline. Il faut monter et descendre dans des ruelles pavées de galets polis, pour encore et encore visiter des églises. Le parcours est payant, mais il vaut le détour, malgré une chaleur torride.
C'est la chiesa di San Giuliano qui nous a réservé la plus grande surprise. Parmi nombre de groupes sculptés en bois, magnifiques, et datant du XVIIIe, il en est un devant lequel nous sommes restés bouche bée et comme terrassés. Pour ceux qui ont suivi notre blog, à la rubrique "La mano fica, Les bas-fonds du baroque, au Petit Palais", le geste obscène de la mano fica n'a plus de secret. Jugez plutôt !
Nous sommes rentrés fourbus chez Valerio pour un nouveau repas pantagruelique.
Mercoledi, nous avons dû le quitter, à regret. Il nous a accompagné jusqu'à Calatafimi pour trouver des espèces. Son lecteur de carte bancaire ne fonctionnait pas (sic). Agrigente nous attendait.